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4 déc. 2017
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Bryn Davies (CBRE) : "Le mystère chinois s’est dissipé pour les marques"

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4 déc. 2017

Eldorado commercial des enseignes internationales, la Chine a connu durant la dernière décennie une mutation de ses malls. Bryn Davies, directeur du développement client Asie du spécialiste international en conseil immobilier CBRE, explique cette évolution, évoquant au passage le destin commercial de l’Inde et, à plus longue échéance, du Vietnam (interview à lire en intégralité sur FashionNetwork Premium).


Bryn Davies - CBRE


FashionNetwork : Le marché chinois est-il, dans les faits, aussi massif que les chiffres l’indiquent pour les marques étrangères ?

Bryn Davies : Je pense que dès que l’on parle de la Chine, beaucoup de gens s’arrêtent aux statistiques impressionnantes : 1,4 milliard d’habitants, des centaines de grandes villes de plus d’un million d’habitants… Et les commerçants sont très intéressés par tout ce que cela pourrait représenter en termes de potentiel. Mais la réalité, pour la plupart des détaillants internationaux qui regardent vers ce pays, est que ce marché se résume en fait à trois ou quatre villes principales (Pékin, Shanghai, Canton et Shenzhen). Et, éventuellement, à une douzaine de villes secondaires (Dalian, Hangzhou, Suzhou, Xi’an…) qui sont très importantes avec chacune 8-10 millions d’habitants. Les quatre principales en particulier ont une population qui commence à voyager énormément et lit beaucoup de publications en ligne liées à la consommation et à la mode. Une clientèle très bien informée, ce qui donne une acceptation très élevée des enseignes qui entrent pour la première fois dans ces zones. Et le risque d’y aller sans que personne ne sache qui vous êtes, alors que vous avez une présence forte en Europe ou en Amérique, s’en trouve grandement réduit.

FNW : Est-ce pour autant plus facile qu’avant de se déployer en Chine ?

BD : Je pense que c’est clairement plus facile désormais, car les outils pour développer une structure sur place sont devenus bien plus efficaces. Mais également parce que les détaillants comprennent maintenant mieux le processus. Même si c’est compliqué, ils savent ce qu’ils doivent faire. L’anglais est en outre bien plus répandu en termes d’apprentissage, ce qui rend plus fluides toutes les démarches commerciales. Et, parce que les marques internationales ont déjà une présence forte en Chine, ceux qui n’y sont pas encore ont pu analyser les attentes en termes d’expérience, d’information et de service. Le "mystère chinois" s’est dissipé pour les marques. L’information est devenue plus accessible. Il y a moins d’incertitude sur les décisions à prendre. En un sens, la Chine n’est plus un marché en développement. Il est déjà développé.

FNW : Les marques se félicitaient précédemment de trouver des partenaires promettant rapidement une centaine de boutiques. Avec le recul, cela vous semble-t-il une démarche pertinente ?

BD : Je dirais qu’aujourd’hui, plus de 50 % des marques pénètrent le marché chinois par elles-mêmes, avec leurs propres fonds. Car, bien que cela nécessite bien plus de ressources, que cela soit clairement plus onéreux, les marques gardent ainsi le contrôle de leurs mouvements. Cela implique certes de grandir sur place à un rythme plus lent, mais les décisions prises sont généralement les bonnes. D’un point de vue spécifiquement immobilier, les bailleurs chinois ne veulent plus travailler avec des partenaires franchisés de marques étrangères. Car ils veulent qu’une marque ouvre une boutique à Shanghai ou Pékin qui soit exactement de la même qualité que celles de Paris, Milan ou New York. Ce n’est plus acceptable d’avoir un magasin d’un niveau inférieur, en termes d’expérience ou de mise en scène. Et la plupart des partenaires ne peuvent offrir cela.


La rue piétonne de Nankin à Shanghai - Matthieu Guinebault/FNW


FNW : Un autre marché croît dans le sillage de la Chine : l’Inde. Connaît-il les mêmes mutations ?

BD : L’Inde a beaucoup évolué grâce au changement de législation, qui permet maintenant aux détaillants de détenir 100 % de leur business dans le pays, même s’il faut encore avoir l’aval du gouvernement central pour y parvenir. La plupart des détaillants qui se tournent vers le marché indien le font toujours au travers d’un partenariat avec une structure locale. Ces deux dernières années, ce qui a surtout changé, c’est la multiplication du nombre de malls de qualité en développement. Pour la première fois, de grandes enseignes comme H&M, Uniqlo ou Gap entrent sur le marché avec la possibilité d’y déployer un portefeuille de 25 à 30 magasins, contre 8 à 10 localisations de qualité il y a quelques années. Le marché grandit en termes de standards immobiliers, en s’alignant sur les modèles internationaux. L’Inde est devenue importante pour les marques de mode qui sont déjà présentes dans les autres pays d’Asie.

FNW : Un autre marché asiatique se démarque-t-il déjà comme une cible des enseignes après l’Inde ?

BD : En termes de nouveaux marchés, l’autre pays asiatique qui revêt un attrait particulier est le Vietnam. Avec un parc commercial ayant une histoire similaire à ce qu’a connu la Chine, une classe moyenne qui grandit et consomme de plus en plus, des clients qui commencent à voyager… Pour les enseignes et marques de mode porteuses de valeur, cela devient donc très intéressant. De plus, dans le cas de marques comme Uniqlo et H&M, il reste peu de marchés où aller en Asie. C’est un autre facteur de motivation pour aller au Vietnam, en plus du fait qu’ils doivent impérativement continuer d’ouvrir des magasins évidemment. En quelque sorte, le Vietnam est le prochain marché disponible, et une étape logique sachant qu’il y aura ensuite les petits pays de la région, comme la Birmanie, mais qui ne soulèvent pas encore le même intérêt.

La totalité de l'interview de Bryn Davies est à retrouver dans l'édition premium de FashionNetwork.com.

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