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1 mai 2017
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Hyères 2017 consacre la Suisse avec Vanessa Schindler et Marina Chedel

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1 mai 2017

La 32ème édition du festival international de mode et de photographie de Hyères, qui s’est achevée dimanche 30 avril, s’est distinguée par la qualité des collections présentées, chacune particulièrement aboutie et portée par une idée forte. De quoi confirmer le niveau toujours plus élevé de ce concours pour la mode, piloté avec passion depuis trois décennies par Jean-Pierre Blanc.

Au centre, la lauréate du grand prix mode de Hyères, Vanessa Schindler - © Jérémie Leconte

 
Le grand prix du jury Première Vision a été raflé haut la main par Vanessa Schindler, dont la performance technique à travers un travail innovant sur la matière a subjugué aussi bien le public, qui l’a récompensée de son prix (du public et de la ville de Hyères), que le jury mode présidé cette année par le directeur artistique de la maison Schiaparelli, Bertrand Guyon.
 
En parvenant à intégrer le tissu dans un plastique souple avec une étonnante habileté, cette dernière a inventé un nouveau vocabulaire textile et ornemental, offrant des jeux de volumes et effets lumineux inédits. Il aura fallu deux ans de recherche à cette jeune femme de 29 ans, originaire du canton de Fribourg, en Suisse, pour arriver à ce résultat.

« J’avais envie de réfléchir sur la notion de vêtement et revenir à une idée d’artisanat avec une innovation radicale : mouler des volumes dans des textiles », raconte-t-elle. Au fil de ses recherches, elle découvre l’uréthane, un polymère liquide. Une sorte de résine chimique qui se fond dans les fibres du textile où elle se fige en surfaces souples et brillantes.
 
Après un long travail d’observation et de multiples tentatives, la designer parvient à plasmer ce liquide, qui, en se solidifiant, lui permet de se passer de couture. Sous le geste de sa main, cette matière, qui fait penser au silicone, soude les tissus entre eux, leur donne du volume, remplace les ourlets, devenant ligne sinueuse ou dessin. Ce matériau se révèle autant fonctionnel que décoratif.
 
Par exemple, une longue robe en polyester transparent se pare de coquillages et serpents en 3D, luisant sous les reflets de la lumière. Ailleurs, l’uréthane se transforme en volants ondulants sur un top en tulle, en bijoux translucides aux formes géométriques ou dans les bords d’un très chic manteau de fourrure.
 

Un look de Vanessa Schindler - © Jérémie Leconte


« J’ai créé un univers », résume Vanessa Schindler, qui partage un grand atelier près de Lausanne avec des artistes et des architectes. Après un bachelor à la Haute Ecole d’Art et de Design (Head) de Genève, elle a enchaîné les stages pendant deux ans chez Etudes Studio, Balenciaga (sous Alexander Wang) et Henrik Vibskov à Copenhague. C’est l’ambiance de travail et de recherche du studio du designer danois qui la motive à reprendre ses études, obtenant en juin 2016 un master, toujours au sein de l’Head.

C’est cette même école qu’a fréquentée Marina Chedel (28 ans), la lauréate du grand prix accessoires de mode Swarovski, avant d’effectuer un stage chez Walter Van Beirendonck et de se spécialiser dans la chaussure avec un master au London College of Fashion, où elle s’est diplômée en décembre 2016.
 
Introduit à Hyères pour la première fois cette année, ce prix accessoires de mode est doté de 15 000 euros, avec la possibilité de réaliser un projet avec les maisons d’art de Chanel à hauteur de 15 000 euros.
 
Le jury, présidé par le créateur de chaussures Pierre Hardy, a été séduit par le concept original de la styliste, née à Rio d’une mère brésilienne et d’un père suisse guide de haute montagne, qui a conçu des chaussures sculpture en bois et cuir « pour se poser et expérimenter de nouvelles sensations, plus que pour marcher ».
 
S’inspirant des montagnes suisses, où elle a grandi « au milieu des crampons, mousquetons et autres cordes », Marina Chedel a réalisé des sandales s’emboîtant dans de vertigineuses semelles plateforme-socles, tour à tour asymétriques, inclinées ou prenant la forme crantée des cimes, « pour donner la sensation de s’élever, d’être sur le pic de la montagne, d’éprouver l’inclinaison de la pente ».
 
Une paire de botte aux talons asymétriques permet quant à elle d’avoir une démarche déhanchée. « Je suis intéressée d’abord par la technique. Je trouve fascinant aussi d’exprimer un propos à travers une si petite pièce telle que la chaussure, comme ici le fait de pouvoir modifier une posture, une démarche », explique-t-elle.

Un modèle signé Marina Chedel, lauréate du grand prix accessoires de mode - Photo by Charles Negre, 2017


Le prix Chloé a été remis à l'Allemande Gesine Försterling pour son modèle offrant une interprétation moderne de la femme Chloé. Un exercice de style imposé aux finalistes depuis six ans doté de 15 000 euros. Lors du concours de mode, la styliste de 30 ans, qui a notamment appris l’art de la broderie en Inde, s’est fait remarquer pour son très beau travail sur le tissage.

Une mention spéciale dotée d’une bourse de 10 000 euros offerte par la maison Schiaparelli a été attribuée par le jury mode à la Finlandaise Maria Korkeila (24 ans). Diplômée de la Aalto University d’Helsinki, cette créatrice dans l’âme (elle peint depuis son enfance), dotée d’une grande habileté manuelle (elle réalise tout elle-même), a superposé l’imagerie de la femme hyper sexuée sur les corps de ses modèles masculins à travers des tricots moulants ou des imprimés sur des tissus aux couleurs chaudes.

Enfin, la Française Marine Serre, en lice par ailleurs pour la finale du LVMH Prize, a été choisie par les Galeries Lafayette pour réaliser une collection capsule, qui sera commercialisée dans le réseau de l’enseigne.

Côté accessoires, la Française Wendy Andreu a obtenu le prix du public et de la ville de Hyères pour sa collection de sacs et de chapeaux. La jeune styliste de 26 ans a inventé une matière, le Regen, un textile ni tricoté, ni tissé, juste collé avec du latex permettant de donner forme à des accessoires imperméables.

Pour la partie photographie, le jury, présidé par Tim Walker, a décerné son grand prix du jury à l'Irlandais Daragh Soden, dressant le portrait de la jeunesse de Dublin. Le tout nouveau prix de la photographie American Vintage a été décerné à l'Américain Luis Alberto Rodriguez, qui a également été récompensé par le prix du public et de la ville d'Hyères. Le prix de la nature morte est revenu à la Néerlandaise Roos Quakernaat.

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