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30 janv. 2017
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L'Italie face au spectre des entreprises françaises

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AFP
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30 janv. 2017

Pas une semaine ne se passe sans que la presse italienne ne se fasse l'écho d'un projet français visant l'une de ses entreprises : l'Hexagone est devenu un spectre, contre lequel certains commencent à brandir l'étendard de l'« italianité ».

Luxottica


« Il y a un projet pour amener UniCredit en France (...), prendre le contrôle de Generali et un morceau important de Mediobanca », la principale banque d'affaires italienne, affirmait le 11 janvier le président de la commission budgétaire de la Chambre des députés, Francesco Boccia. « Nous sommes en train de perdre des morceaux importants du système financier et économique italien », ajoutait-il, en proposant une enquête sur l'avenir du capitalisme dans la péninsule.

Régulièrement, la presse italienne égrène la liste des entreprises passées sous giron français, du luxe à la banque, en passant par l'agroalimentaire : Gucci, Bulgari, Loro Piana, Pioneer Investments, Parmalat... Pour beaucoup, des entreprises considérées comme des fleurons du Made in Italy.

La fusion du fabricant de lunettes Luxottica avec le français Essilor a de nouveau plongé le pays dans le doute - le siège du futur géant étant situé en banlieue parisienne.

A tel point que son patron, Leonardo Del Vecchio, a dû se fendre d'une note pour rassurer ses troupes : sa holding sera « à long terme » l'actionnaire principal du nouveau groupe et si lui-même venait à se retirer avant trois ans, des clauses contractuelles prévoient que son poste de PDG « revienne à un homme de Luxottica ».

La montée éclair en décembre du français Vivendi au capital du groupe de médias Mediaset, dont il détient désormais près de 30 %, semble avoir créé un traumatisme. Même le gouvernement de centre-gauche est monté au créneau pour critiquer la façon « non appropriée » dont s'était déroulée la manœuvre, apportant un soutien inattendu à Silvio Berlusconi (droite).

« Les Français sont plus forts dans la défense et dans l'attaque. Ils sont plus organisés », a déploré le président de Mediaset, Fedele Confalonieri, en « remerciant le Parlement, le gouvernement, les journalistes et l'opinion publique qui nous ont défendus ».

A la suite de l'« escalade hostile » de Vivendi, qui s'était déjà emparé en 2015 de près du quart de Telecom Italia, le gouvernement a indiqué réfléchir à augmenter les obligations de transparence pour les acquéreurs.

« Rôle stratégique »

Silvio Berlusconi a lui appelé à la mobilisation des « comités pour la défense de l'italianité de Mediaset », expression qui a interrogé jusque dans la presse. Il s'agit en fait des actionnaires historiques sur lesquels les Berlusconi espèrent pouvoir compter.

Une « italianité » que, selon la presse italienne, la banque Intesa Sanpaolo souhaiterait elle aussi défendre, en prenant le contrôle de Generali, alors qu'on dit l'assureur convoité par le français Axa.

En septembre, le patron de Generali, Philippe Donnet, a néanmoins démenti tout projet de fusion avec Axa. Le patron de l'assureur français, Thomas Buberl, a lui même réaffirmé récemment qu'acquérir un de ses grands concurrents comme Generali n'était « pas (la) stratégie » du groupe.

Intesa a confirmé pour sa part étudier d'éventuelles synergies avec Generali, et les médias croient de plus en plus à l'hypothèse d'une offre publique d'échange lancée par la banque.

« Generali a dans son porte-feuille quelque 70 milliards d'euros de titres de l'Etat italien » et a donc « un rôle stratégique pour tout le pays », ce qui pourrait être une des raisons expliquant l'intérêt d'Intesa, déclare Marco Giorgino, professeur à l'école Polytechnique de Milan. Il souligne néanmoins « penser et espérer que la défense de l'italianité n'est pas la seule cause : aujourd'hui en Europe, on s'oriente vers une consolidation du système financier, avec la constitution de grands acteurs, qui font de la banque, de l'assurance... » et l'opération peut avoir un vrai « sens stratégique » pour Intesa.

L'entremêlement des actionnariats et la présence de Français comme dirigeants alimentent constamment les spéculations. Philippe Donnet est un ancien d'Axa, mais aussi un ex-membre du conseil d'administration de Vivendi, groupe du Français Vincent Bolloré.

Le premier actionnaire de Generali est Mediobanca, détenue pour sa part, à hauteur de 8 % chacun, par Vincent Bolloré et par UniCredit. Mais Jean-Pierre Mustier, le patron, français, de cette banque italienne, a affirmé mi-janvier dans un entretien à La Stampa que « Generali devait rester italien », en demandant que cesse « la paranoïa » sur... les Français.

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