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Lisa D. : une mode engagée contre les contradictions de la mondialisation

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28 sept. 2007


Lisa D. collection automne-hiver 2007/2008
BERLIN, 28 sept 2007 (AFP) - Une tenue, un message. Avec sa marque Global Concern, la créatrice de mode autrichienne Elisabeth Prantner, alias Lisa D., invite à corps perdu à réfléchir aux contradictions de la mondialisation.

Sa formation de sociologue déteint sur ses créations. Famine, travail des enfants, guerres ou répression des minorités : à travers tous ces thèmes de critique sociale, Lisa D. veut "attirer l'attention sur la façon dont nous vivons et faire prendre conscience de toutes nos contradictions".

L'entière confection de Lisa D. est réalisée de A à Z dans son atelier situé en plein coeur de Berlin, à deux pas de sa boutique de prêt-à-porter. Penchées sur leurs machines, trois couturières à temps plein et leurs assistantes, manipulent le tissu importé à 90% d'Italie.

A 50 ans, Elisabeth Prantner, taille mannequin (1m80) et tempérament à l'emporte-pièces, aime les expérimentations. Les recettes de sa boutique lui donnent le luxe de réaliser ses projets engagés et à dimension artistique.

Comme "Global Concern" lancée en 2003. De son bureau attenant à son atelier et où elle entrepose ses pièces uniques, la grande dame aux cheveux roux et aux yeux pétillants de malice montre fièrement une robe bustier ornée de dessins d'enfant représentant des petits qui pleurent les larmes de leur dure labeur. Trop provocante, "une robe comme celle-là ne passera jamais à Hollywood", défie Lisa D.

De la même marque, il y a aussi une robe faite de 70 plaquettes de pilules placebos et "Le Petit Noir", une robe cocktail en crochet laissant apparaître sur le côté la silhouette d'un petit Africain ballonné, signe de malnutrition.

Tout aussi engagée et politiquement incorrecte, la collection "Boat People" s'attaque directement aux méthodes de production dignes de l'"exploitation" dans l'industrie vestimentaire des pays en développement.

Sa bête noire: le groupe d'habillement bon marché H&M. "Il a toujours été mon ennemi. Il a ruiné le marché", fustige la créatrice, consciente de mener une "lutte à la David et Goliath" tout en déployant des trésors d'ingéniosité.

La créatrice autodidacte s'approvisionne dans les rayons bébés de la chaîne suédoise. Il lui faut entre "deux jours et une semaine" pour recycler ses emplettes en une tenue exclusive sur laquelle elle prend soin de laisser apparentes les étiquettes du prix et du lieu de fabrication du vêtement.

Avec 20 layettes et plusieurs coups de cisailles, elle conçoit une robe du soir. Ou encore un pancho rose pour adulte à base de barboteuses.

"Je profite comme nous tous de cette industrie bon marché", reconnaît Lisa D. qui dit lutter aussi pour sa propre (sur)vie: "Je n'ai tout simplement pas envie de faire fabriquer mes collections là-bas. Je veux rester autonome."

En termes de coût salarial, "le travail de confection des 1.300 vêtements pour bébés que j'ai achetés est aussi élevé que celui de deux tenues que je réalise".

Si le concept séduit de nombreux clients, le prix des confections qui se vendent à partir de 500 euros, les rebute tout autant.

En novembre, Lisa D. présentera "Boat People" à Tokyo, "où H&M n'est pas encore implanté". Face à cette provocation, le groupe suédois semble rester stoïque. Lisa D. affirme avoir reçu "une fois, un email", ni menaçant, ni insultant.

Née à Klagenfurt, Lisa D. part à 26 ans à New York, où elle s'initie à la couture. Connue pour choisir des podiums insolites pour ses défilés, elle se montre critique à l'égard la haute-couture qui, selon elle, célèbre "la nostalgie d'une époque où l'image de la femme prend des airs de déesse ou de conte de fée".

Serait-elle donc féministe? Lisa D. répond par une pirouette: "Je suis un macho, c'est mon mari qui le dit". Plus exactement "une femme moderne" dont le miroir porte l'inscription: "Trust the girls".

Par Anne PADIEU

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