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Anita Tillmann (Premium): "Berlin est devenue la métropole la plus moderne et urbaine du monde"

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14 janv. 2014

Le Premium, qui se déroule du 14 au 16 janvier et accueille 900 exposants pour 1500 collections, mise plus que jamais sur le service aux détaillants. Anita Tillmann, cofondatrice et directrice générale, livre à FashionMag.com ses réflexions sur les salons et surtout sur la place de Berlin sur la scène de la mode. En Berlinoise convaincue, elle rappelle entre les lignes que Rome ne s'est pas faite en un jour. Pour rappel, c'est en janvier 2003 que la capitale allemande voit débarquer le Bread & Butter depuis sa base de Cologne et que le Premium fêtait sa première dans les couloirs du métro à la station Potsdamer Platz.

Anita Tillmann. (Photo Juergen Schabes)


FashionMag.com: En juillet 2014, vous serez le seul des trois grands salons berlinois à n'être dédié qu’aux professionnels. Vous renforcez même cet axe dans votre communication ?
Anita Tillmann: Pour le Panorama, je ne sais pas où en est la décision. Depuis le début (en 2003 ndlr), le Premium est un salon BtoB. C’est même sous cette forme là le plus grand d’Allemagne voire d’Europe. Nous avons décidé du coup de renforcer nos services auprès des acheteurs. Comme le lancement pour cette saison d’une application match-making. Les visiteurs précisent en ligne ce à quoi ils sont intéressés et ensuite le système de navigation les guide à travers le salon. L’objectif est de démarrer par les priorités et ensuite de flâner et de découvrir différemment.

FM: Concrètement ?
AT: J’ai un magasin de mode féminine et recherche de nouvelles propositions en maille et en jeans. Le système vous conduit. Cela permet d’utiliser au mieux son séjour. Car l’idéal est de tout découvrir à Berlin. Nous devons mieux connecter du coup les marques aux détaillants.

FM: Vous mettez également un service starter en place ?
AT: Les détaillants qui le souhaitent peuvent être guidés en 6 langues dont le français, le russe et le japonais (le service aux acheteurs chinois étant spécifique). Le guide les accompagne et leur explique les halls, l’offre, le concept… également les tendances. C’est ce souci de dialogue entre les acheteurs et les exposants qui est au centre de nos préoccupations.


FM: Mais l’annonce du Bread & Butter, associé parfois à l’international à Berlin, de s’ouvrir au grand public ne perturbe-t-elle pas le jeu.

AT: Je ne critique pas Karl-Heinz Müller. Au contraire, je suis curieuse et il a fait tellement de choses bien. Avant de critiquer, les gens devraient attendre. Car, dans la mode, la seule constance, c’est le changement. Mais attention, cela peut fonctionner pour le segment du Bread. Mais, à mon sens pas pour le premium, que nous couvrons.

FM: Donc, le changement en juillet pour le Premium ?

AT: D’abord, nous faisons cette édition avec de nouvelles marques et de nouveaux services… Et ensuite, nous parlerons de juillet. Une session après l’autre.

FM: De nombreuses marques multiplient la participation à des salons de petite taille. Etait-ce l’idée de vos salons de Munich et de Düsseldorf ?
AT: A Berlin, nous montrons un portefeuille de marques qui sont en partie présentes en Allemagne via des agents et en partie pas encore représentées. Le détaillant s’informe et travaille son budget à Berlin. Il peut passer des ordres auprès de marques qu’il ne verra plus. A Düsseldorf et à Munich (Premium Order Düsseldorf se déroule du 1 au 3 février et la version munichoise du 15 au 18), nous offrons des showrooms multimarques, des satellites en somme. Ce sont souvent les mêmes visiteurs qu’à Berlin qui commandent définitivement. C’est une question de logistique des précommandes.

FM: Vous dites que le Premium est le plus grand salon d’Europe ? Mais, l’offre à Paris ou ailleurs est vaste.
AT: Aucun autre salon n’a 25000 mètres carrés avec de l’homme, de la femme et des accessoires. Prenez Paris, l’homme et la femme ont des sessions différentes.

FM: Quel avenir pour Berlin ?
AT: Il y a dix ans, nous avons commencé à Berlin avec le but de changer le paysage des salons. La fashion week de Berlin avait pour vocation d’intégrer une place moderne sur le Vieux Continent. Depuis des siècles, Paris affiche complet et Milan est italien. Ici, nous sommes également au centre d’une Europe avec les germanophones, les Scandinaves et les pays d’Europe de l’Est. Il n’y avait jusqu’ici aucune fashion week en Allemagne, aucune offre premium. Le potentiel de la ville est là avec les start-up, le digital, l’art, la mode, la musique… Berlin s’est développé telle la métropole au monde la plus jeune, urbaine et moderne.

FM: Pourtant à regarder le programme, les griffes les plus connues ne défilent plus à Berlin ?
AT: Lesquelles ? (un peu énervée, ndlr).

FM: Hugo Boss, Eastpak, Rena Lange, Escada
AT: D’un point de vue journalistique, la question est fausse. On n'a pas d’histoire de designers de mode allemands. Les Allemands ont travaillé pour des griffes étrangères. Une nouvelle communauté s’est formée. Marc Jacobs est américain, il défile où ? à New York. Idem, pour Ralph Lauren. Céline est une maison française et défile à Paris. Versace à Milan… Pourquoi devraient-ils défiler à Berlin ? Les Allemands ont maintenant une place pour se montrer au monde et être pris au sérieux. Les noms sont assez récents comme Michalsky, Lala Berlin… auxquels s’ajoutent des créateurs établis comme Schumacher, Allude… Quant à Hugo Boss, il faut regarder les raisons. Un nouveau management (cf. dans les divisions communication notamment) change tout au début. Mais, ils reviendront. Et franchement, même si j'adore et respecte la marque, Berlin n’est pas Hugo Boss. Et de nombreuses griffes ne sont pas encore aussi grandes.

FM: Et le potentiel ?
AT: Berlin dit croître de façon organique. Un proverbe chinois rappelle que l’herbe ne pousse pas plus vite quand on tire dessus. La ville offre un concept moderne. Tout en quatre, cinq jours avec les salons, les défilés… et ce au début de la saison. Aux Etats-Unis, les acheteurs viennent à New York pour les défilés et doivent revenir pour les salons. Côté offre à Berlin, prenez le Seek, à 90 % masculin, il se complète parfaitement avec notre offre premium masculine. Nous avons aussi récemment mis en place Essence of Premium (plus italien, traditionnel avec cet artisanat qui rencontre le moderne) et Dissonance, dédié à l’avant-garde qui rencontre le streetwear (japonais, américain…) qui côtoie les Berlinois. Les Asiatiques vont à Paris. Mais, la nouvelle génération ne veut pas faire de file d'attente et de codes. Ils apprécient la spontanéité. Or, Maintenant, c’est ça aussi Berlin.

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