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3 juin 2020
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Derrière le démantèlement de La Halle, les entrepôts oubliés de l'Indre

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3 juin 2020

«On est au bord de la route et on va se faire laminer». Aucune des sept offres de reprise de l'enseigne de vêtements La Halle n'inclut les deux plateformes logistiques de l'Indre: 487 emplois directs sont menacés, d'autres pourraient suivre.


Banderoles devant la plateforme logistique d'Issoudun - AFP



«La situation est catastrophique pour les dépôts d'Issoudun (285 salariés) et de Montierchaume (202). (...) Aucun des repreneurs n'est intéressé par la logistique», constate, dépité, Philippe Visse, délégué syndical CFTC.

«Les administrateurs sont à la recherche d'un logisticien. Mais si au 8 juin, il n'y a pas de logisticien repreneur, on enchaîne avec un plan de sauvegarde l'emploi», explique-t-il, devant l'entrepôt issoldunois. Derrière lui, une croix de plusieurs mètres symbolisant l'enterrement du site se dresse avec l'inscription «1984-2020».

Fragilisée par deux mois de fermeture pendant le confinement, après les «gilets jaunes» et les grèves contre la réforme des retraites, La Halle a été placée en procédure de sauvegarde le 21 avril. Son propriétaire, le groupe Vivarte, a fini par demander son redressement judiciaire fin mai, validé le 2 juin par le Tribunal de Commerce de Paris.

«Nous avons reçu sept offres (...) qui reprendraient à ce stade 3.195 personnes sur 5.391», avait alors affirmé Patrick Puy, le PDG de Vivarte. «2.196 personnes, à ce jour, ne seraient pas reprises.»

Près de 500 de ces laissés pour compte travaillent dans les entrepôts d'Issoudun (chaussures) et de Montierchaume (vêtements), près de Châteauroux.

«Personnellement, je n'y crois pas du tout», confie Thierry Genet, délégué FO. «Nos dépôts ne sont pas top au niveau sophistication. Il n'y a pas de robotique et tout ça. (...) Fin juillet, début août, on est au tas.»

«M. Macron a dit "on ne laissera personne sur le bord de la route". Nous, on est au bord de la route et on va se faire laminer, écraser», abonde son collègue de l’intersyndicale, Patrice Sénéchal, représentant de la CAT (confédération autonome du travail). «Pour l'espoir de retrouver du boulot, c'est zéro. Les entreprises autour sont dans le même état que nous. Il va y avoir un effet domino.»

«Il n'y a pas que nous», confirme Philippe Visse. «On a des fournisseurs, des transporteurs. Ils vont aussi y laisser des plumes. (...) On est les oubliés, par rapport aux grands groupes comme Renault

«Ça relève du drame social»



A la porte de l'usine, les équipes de l'après-midi entrent par petits groupes, bouteilles d'eau sous le bras pour lutter contre la chaleur écrasante. Beaucoup font part de leur colère et de leur désespoir.

«On est dégoûté», s'agace Corinne Bernard, qui travaille sur le site depuis sa création par le chausseur André en 1984. «Je suis à quatre ans de la retraite, je n'ai pas beaucoup d'espoir de retrouver du travail.»

«On a besoin de nous, on nous fait travailler. On n'a plus besoin de nous: au revoir et merci!», s'emporte Bruno Deleuvre, entré dans l'entreprise en 1990.
L'espoir? «Noël, c'est passé (...) C'est 500 personnes au chômage et la région est sinistrée.»


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Même constat pour Thierry Genet: «Il ne faut pas espérer grand chose après le licenciement. Toutes les entreprises du secteur sont bancales, comme nous.»

A la mairie d'Issoudun, André Laignel, qui s'était battu pour attirer André au début des années 1980, veut tout tenter pour éviter le naufrage. «Il y a 285 employés, mais nous avons aussi trois grosses entreprises de transport qui seront en danger. Cela concerne donc plus de 500 emplois. Cela relève du drame social», déplore le maire PS. «Je vais saisir le Premier ministre. Dans son discours du 16 mars, le président de la République s'est engagé (...) Le drame qui se joue nécessite une intervention puissante et efficace de l'Etat», insiste l'élu, en poste depuis 1977. Avec les difficultés rencontrées par Safran Seats, spécialiste des sièges d'avion, «on va perdre 1.150 emplois sur une ville de 12.000 habitants».

«Issoudun est la ville la plus sinistrée et rapidement l'Indre va suivre. On parle de Renault, mais au niveau local, c'est un sinistre bien plus important», estime André Laignel. «Nous n'allons pas nous laisser mourir sans réagir.»

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