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En Asie, dans l'industrie textile les inégalités salariales homme-femme persistent

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1 juil. 2022

L'Organisation internationale du travail (OIT) a publié le 24 juin un nouveau rapport sur la situation des travailleurs asiatiques des industries du textile, de l'habillement et de la chaussure. Un document qui pointe notamment la stagnation des salaires dans de nombreux pays d'Asie, ainsi que les écarts de salaires qui persistent entre hommes et femmes.


ILO


L'étude passe en revue les chiffres disponibles dans neuf pays d'Asie, où les salaires mensuels moyens des secteurs textiles vont de 101 dollars pour l'Indonésie à 362 dollars en Thaïlande. Le document de l'OIT pointe par ailleurs que, contrairement aux idées reçues, les salaires moyens du textile dans ces pays se situent désormais généralement légèrement au-dessus des salaires médians régionaux.

"Bien que l'on pense que les salaires minimums sont indicatifs des salaires en vigueur dans le secteur de l'habillement en Asie - en raison de travaux à faibles compétences, des faiblesses des négociations collectives, et des systèmes salariaux fondés sur le mérite - ces dernières années, les salaires moyens et médians des employés du secteur ont généralement dépassé les salaires minimums pour les pays dont les données sont disponibles", explique l'OIT.

Une situation qui n'empêche pas de nombreuses entreprises, notamment pakistanaises et indonésiennes, de transformer le "plancher" que représentent les salaires minimaux locaux en "plafond'. Une logique qui se heurterait cependant à la volonté de montée en gamme des productions, notamment en Bangladesh, ainsi qu'au Cambodge, Sri Lanka et Vietnam. Une croissance en termes de valeur qui n'entraine pas systématiquement un accroissement des salaires, pointe le rapport, qui souligne par ailleurs que certaines hausses de salaires sont parfois contraintes par l'instauration ou la hausse des salaires minimums légaux.

En outre, les données nationales disponibles ne prennent généralement pas en compte les ouvriers du textile "auto-entrepreneurs"' (self-employed, ndlr). Des personnes auxquelles les entreprises ont régulièrement recours pour certaines étapes précises de production. Et dont les faibles niveaux de revenus constituent un angle mort pour les statistiques liées aux salaires du secteur. L'Inde, la Birmanie et le Pakistan seraient concernés par ce type de fonctionnement.

Les ouvrières toujours exposées aux écarts de salaires et au sexisme



Selon les pays observés, les femmes représentent entre 39% (en Inde) et 80% (en Birmanie) des ouvriers du textile. L'OIT pointe que les pays affichant la plus faible part de travailleuses sont aussi ceux où les femmes souffrent des plus gros écarts de salaires (NB: sauf l'Inde, où les données manquent sur ce point).

L'écart observé atteint ainsi 41% au Pakistan, 33% au Sri Lanka et 22% au Bangladesh, les écarts allant ensuite de 2% à 12% entre Cambodge, Birmanie, Vietnam, Philippines et Thaïlande. L'Indonésie ferait figure d'exception, les données montrant des salaires en moyenne 5% supérieurs pour les ouvrières.


Positions des salaires du textile par rapport aux salaires médians nationaux (en haut) et Variations de la part des salariés dans l'emploi, secteur et sous-secteurs de l'industrie textile, habillement et chaussure - ILO


Des données à prendre avec prudence, explique l'OIT. Quand ce sont les salaires mensuels qui sont observés, sans les heures supplémentaires, l'écart se creuse, atteignant 68% pour le Pakistan et 17% pour les Philippines. En Birmanie, la mise en perspective des deux modes de calcul laisse ainsi supposer que les femmes multiplient les heures supplémentaires pour compenser l'écart salarial qui les sépare des hommes. Les écarts auraient en outre tendance à se résorber plus facilement dans des domaines spécifiques, comme le travail du cuir et la fabrication de chaussure.

Mais les femmes restent néanmoins sur-représentées parmi les ouvriers à bas salaires (gagnant moins de deux tiers du salaire régional médian). Des bas salaires qui concerneraient 32% des ouvrières du textile, contre 16% des ouvriers, sur la moyenne des neuf pays où des données sont disponibles. Les taux de travailleuses du textile précaires sont particulièrement élevés en Indonésie (31%), aux Philippines (20%) et au Sri Lanka (17%).


Parts des bas salaires dans les filières textile nationales, par pays et sexe - ILO


"La ségrégation entre les sexes par profession est telle que le secteur est dominé par les femmes en bas de l'échelle et par les hommes en haut de l'échelle dans un environnement hautement compétitif et stressant, avec un contrôle et une responsabilité limitée, ce qui peut entraîner des violences sexistes", indique le rapport.

"Il existe de nombreux cas documentés d'expériences vécues de luttes de travailleuses de l'habillement, allant des perturbations de la vie familiale aux abus physiques, dans des pays comme le Bangladesh, l'Inde et le Myanmar. Dans de nombreux cas, les cadres de niveau moyen ou inférieur ont recours à la violence physique et sexuelle le long des lignes de production, en toute impunité", précise-t-il.

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