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Paul Kaplan
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3 mars 2021
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La Fashion Week de Paris fait valoir sa force d'attractivité pour l'avant-garde comme les grandes maisons

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Paul Kaplan
Publié le
3 mars 2021

Pandémie ou pas, la Fashion Week de Paris — qui débute le lundi 1er mars pour 10 jours — peut se targuer d'un calendrier chargé, avec 92 marques de prêt-à-porter féminin, près d'une douzaine de nouveaux membres et plusieurs premiers défilés très attendus, qui témoignent de l'attractivité constante de la capitale française pour les maisons de mode.


Cette saison, Christian Dior défilera le 8 mars, journée internationale des droits des femmes - © PixelFormula

 
Et même si cette saison restera essentiellement virtuelle, elle regroupera tout de même les mastodontes de la mode mondiale, comme Christian Dior, Hermès, Chanel et Louis Vuitton, qui dévoilera la dernière collection parisienne, le mercredi 10 mars dans l'après-midi. Actuellement, les autorités interdisent de réunir du public, mais la Fédération de la Haute Couture et de la Mode indique qu'une dizaine de maisons diffuseront en direct de véritables défilés, organisés à huis clos. 

Depuis le début de la pandémie, la Fédération a radicalement restructuré son site Internet, qui retransmet chaque présentation en direct. Cette saison, l'organisation lance un nouveau partenariat exclusif avec Tik Tok, en invitant les utilisateurs de l'application à créer des looks spéciaux à l'occasion de la Fashion Week de Paris, et à les partager via un hashtag dédié.

La Fédération ajoutera également les lookbooks des créateurs à sa plateforme, ce qui n'était pas le cas auparavant, et établira un partenariat avec le V&A à Londres. Le musée fournira des vidéos et des articles issus de son programme Fashion in Motion pour la section "magazine" de la plateforme.

Soulignant la nature de plus en plus fragmentée des saisons de défilés dans les quatre grandes capitales de la mode — organisées chronologiquement à New York, Londres, Milan et Paris —, de nombreuses marques dévoilent leurs collections des jours, voire des semaines après la fin de la saison officielle. 

C'est le cas du président actuel du Council of Fashion Designers of America (CFDA), le designer Tom Ford, qui a dévoilé sa dernière collection la veille de l'ouverture de la saison parisienne, soit 10 jours après son créneau initial, prévu dans le cadre de la saison new-yorkaise. 

À Paris, le studio de Sonia Rykiel a lancé sa nouvelle collection hors calendrier, dans la nuit du dimanche 28 février, alors que la marque se remet sur pied après sa faillite en 2019. Dior, sous la direction de la créatrice féministe la plus célèbre de la mode, Maria Grazia Chiuri, a décalé son défilé au 8 mars pour coïncider avec la Journée internationale des droits des femmes. Autre surprise, Louis Vuitton a soudainement décidé de reporter son propre défilé d'un jour.

Interrogé sur la décision de Louis Vuitton, Ralph Toledano, le président de la Fédération de la Haute Couture et de la Mode, esquive: "C'est nous qui avons prolongé la Fashion Week d'un jour !"

"Nous avons tous conscience de la nécessité d'être flexibles et inclusifs", complète le président exécutif de la Fédération, Pascal Morand, au cours d'une conférence téléphonique.

"Les maisons ne changent pas de date pour faire des difficultés. Je crois savoir que dans le cas de Tom Ford, il s'est rendu compte que la pandémie avait vidé son atelier. Nous n'avons pas d'autre choix que de prendre tous ces changements avec philosophie", renchérit Ralph Toledano.

Les deux grands patrons de la mode française déclarent qu'avec 92 maisons, membres habituels et invités confondus, le calendrier a gagné près de dix participants par rapport à la dernière édition de septembre dernier, et retrouve son niveau de mars 2020. 

Fait inédit, la saison parisienne a démarré avec le défilé commun des diplômés de l'Institut Français de la Mode (IFM), une manière pour les institutions de la mode française de réaffirmer leur détermination à construire une école de mode qui serait en mesure de rivaliser avec ses homologues de Londres, de New York ou d'Anvers.

"Notre rêve, c'est que Paris dispose de la meilleure école de mode, et la plus prestigieuse. Vous vous souvenez peut-être que c'était mon premier objectif lorsque je suis devenu président. Puis Pascal s'est engagé dans l'aventure, et nous avons parcouru un long chemin ensemble. Xavier [Romatet, le directeur général de l'IFM] fait un travail fantastique et c'est la première étape de notre rêve qui devient réalité", se réjouit Ralph Toledano.

Mais de nombreuses marques très réputées, comme les Japonais Comme des Garçons et Junya Watanabe, et trois maisons du groupe de luxe KeringBalenciaga, Saint Laurent et McQueen — ne présenteront pas leurs collections, ce qui prive Paris d'une visibilité majeure.

"J'ai tendance à croire que chaque maison de Kering a ses propres raisons. Je n'ai pas l'impression qu'il s'agit d'une décision du groupe. C'est une période difficile pour tout le monde et il faut le respecter. Et, n'oubliez pas, Balenciaga revient à la couture cet été", rappelle Ralph Toledano.

La Fédération contribue également au soutien des jeunes créateurs via son showroom parisien, Sphere. Tout en finançant la production de vidéos de présentations, grâce notamment au DEFI, un fonds alimenté par le secteur français de la mode. L'Oréal apporte également son soutien en fournissant gratuitement coiffure et maquillage à certains créateurs indépendants. Un dispositif de soutien mis à la disposition de créateurs locaux et internationaux, de jeunes espoirs comme Benjamin Benmoyal, Kenneth Ize ou Thebe Magugu, qui ont tous bénéficié de ces initiatives.


Kenneth Ize - Printemps-Été 2021 - Prêt-à-porter féminin - Paris - © PixelFormula

 
Aucun des deux dirigeants de la Fédération ne peut affirmer avec certitude si les défilés parisiens de juin-juillet pourront avoir lieu en direct et en public. 

"Cela dépendra des conditions sanitaires. Et nous respecterons la décision du gouvernement, quelle qu'elle soit. Mais, soyons clairs, toutes les maisons meurent d'envie de revenir aux défilés physiques. Beaucoup de designers sont très frustrés", confie Pascal Morand.

Paris continue également d'attirer de jeunes designers, avec 11 nouveaux venus sur le calendrier en mars, dont Benjamin Benmoyal, Weinsanto, Cecilie Bahnsen, Rokh et Wataru Tominaga. Et la saison sera marquée par les premiers pas de deux nouveaux directeurs créatifs chez Chloé et Courrèges, respectivement Gabriela Hearst et Nicolas Di Felice.

"Pour moi, c'est très simple. Quand on est jeune et qu'on rêve de mode, on pense immédiatement à Paris. Paris reste un aimant. Quand on est un jeune créateur ambitieux, on veut rivaliser avec les meilleurs. Comme pour un footballeur professionnel qui souhaite se mesurer à plus fort que lui, à un Lewandowski, un Messi, un Salah. C'est la même chose dans la mode, à Paris", sourit Ralph Toledano.

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