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9 févr. 2021
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Luxe post-2020: les cinq priorités sur la table des décideurs

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9 févr. 2021

L’industrie de la mode et du luxe est confrontée à une profonde mutation de son modèle de business, qui s’est accélérée avec la pandémie. Les réflexions engendrées par la crise tout au long de 2020 autour de nouvelles organisations et processus ne se sont pas encore traduites dans la réalité opérationnelle, mais le changement est en acte. Structure de la collection, processus de développement du produit, approvisionnement, durabilité et planification-logistique sont les cinq dossiers urgents sur lesquels planchent les dirigeants des maisons et entreprises textiles, selon une recherche présentée par Sistema Moda Italia (SMI), qui fédère les entreprises du textile et de l’habillement italien.
 

Quelles clés pour comprendre les changements structurels dans le luxe ? - ph Viviane Sassen - Louis Vuitton

 
L’enquête, réalisée en juillet dernier auprès des PDG de 300 entreprises leader dans le luxe entre la France et l’Italie, pesant un chiffre d’affaires total de 25 milliards d’euros, met en avant les grands changements structurels qui devraient toucher le secteur, au-delà des thèmes déjà amplement abordés jusqu’ici, tels que l’accélération du digital, les nouveaux modèles de distribution et l’interaction avec le consommateur. Cette mutation, qui devrait se mettre en place en 2021, commencera à se voir en 2022, alors que la relance du marché n’est pas attendue avant 2023.
 
Le principal enseignement de cette étude porte sur le rapport entre fournisseurs et marques, qui sera notamment amené à se modifier, avec une intégration plus forte et une réelle interaction entre l’amont et l’aval, que ce soit dans le processus créatif et de développement du produit que dans la planification des productions et de leur livraison. Les fournisseurs joueront un rôle fondamental en termes de compétences, services et durabilité. C’est à eux de prendre les devants pour proposer des solutions aux marques, qui souvent ne sont pas dotées des connaissances suffisantes, estime l’auteur de l’étude Luca Bettale, partner senior de Long Term Partners

 
Comme il l’a souligné lors de la présentation de l’étude en visioconférence, le 4 février, "le choc du Covid-19 a été pour les acteurs du marché la découverte de l’incroyable fragilité de la mode et du coût engendré par sa rigidité, qui s’est révélé bien supérieur par rapport aux économies réalisées en renonçant à un système plus flexible". La flexibilité va devenir la clé de voûte du futur modèle de business de l’industrie du luxe, dont la spécificité saisonnière va s’estomper. Son activité ne sera plus dictée exclusivement par les saisons, comme auparavant.
 
La saison n’est donc plus la seule référence, tout comme la cadence traditionnelle des collections. Comment construire du coup les collections à l’avenir ? De nombreuses marques ont commencé à réduire leur ampleur avec près de 30% de références en moins. Il ressort de l’enquête la volonté d’aller plus loin, avec une majeure simplification de la collection, qui devra s’appuyer davantage sur les analyses de données des consommateurs. La structure saisonnière de l’offre devra être réduite et compensée par des nouveautés distillées chaque mois pour rafraîchir l’offre.

C’est aussi une question de communication. Pour créer l’engagement sur les réseaux sociaux, il faut des produits nouveaux, même si ce ne sont pas forcément ceux que les marques souhaitent vendre par rapport à leur collection principale. Pour cela, il faut se réorganiser et se doter de nouveaux outils, au-delà de la data. "Les managers sont tous en train de plancher sur le PLM (Product Lifecycle Management), soit des solutions de gestion du cycle de vie des produits", glisse Luca Bettale.


Les cinq priorités pour le luxe, dans cet exemple de questionnaire - DR

 
Le modèle d’approvisionnement doit être, en conséquence, plus flexible et construit en partenariat avec les fournisseurs. Les groupes les plus puissants l’ont bien compris, comme en témoignent les multiples acquisitions de certains de leurs fournisseurs de la part des maisons pour avoir un contrôle sur leur filière. A défaut de moyens, les entreprises du luxe devront instaurer un vrai dialogue et une relation étroite avec leurs partenaires en amont.
 
La transformation de l’offre va avoir des répercussions sur le processus créatif, qui va devenir continu tout au long de l’année, tout comme la réalisation des prototypes. Mais aussi sur la production avec la nécessité de réaliser à brèves échéances des quantités de produits plus petites, qui restent en ligne toutefois avec le thème de la saison (couleurs, tissus, etc.). D’où l’amélioration nécessaire de la logistique entre approvisionnements et flux physiques.

"Les temps, les rythmes et les volumes vont changer. Tout comme la manière de travailler. Les maisons doivent se construire un système d’approvisionnement flexible. Ce sera beaucoup plus coûteux, mais la mise en place de cette transformation est fondamentale. Pour cela il faut planifier et ingénieuriser la flexibilité, le faire à moindre coût, en accord avec les producteurs, organiser les risques de stocks", indique l’auteur de la recherche.
 
A cela s’ajoute le thème du développement durable. "Les consommateurs exigent désormais du concret et les entreprises doivent s’activer plus sérieusement sur ce thème, qui était pour la plupart jusqu’ici du ressort de la communication et du marketing. Il est évident là encore, que le changement ne pourra se réaliser qu’en partenariat avec les fournisseurs. C’est en se mettant ensemble, que les deux parties pourront affronter tous ces thèmes et pour cela, il faut une forte proposition conceptuelle" conclut Luca Bettale.

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