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Royaume-Uni : la croissance morose provoque un examen de conscience

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24 nov. 2017

L'abaissement brutal des prévisions de croissance du Royaume-Uni quand l'heure de la reprise sonne ailleurs a provoqué un choc dans le pays qui s'interrogeait jeudi : « Comment en est-on arrivé là ? ».



En pleine incertitude liée au Brexit, l'institut public chargé des prévisions OBR, indépendant du gouvernement, n'attend plus qu'une croissance comprise entre 1,3 % et 1,5 % jusqu'en 2021.

Le quotidien The Guardian affichait un escargot portant une pièce d'une livre en guise de coquille en Une de son cahier spécial budget de jeudi matin. « La crise de Suez en 1956 fut le moment où le Royaume-Uni se rendit compte qu'il n'était plus aussi puissant qu'avant. Le budget 2017 est son équivalent économique », a commenté sombrement Larry Elliott, éditorialiste économique du journal.

Ces prévisions peu reluisantes contrastent avec le dynamisme affiché par le pays depuis la crise financière de 2008-2009, qui l'avait plongé dans la récession et vidé ses caisses. Et ce alors qu'au même moment les principales économies du continent européen sont portées par une conjoncture meilleure et que le Royaume-Uni se trouve en outre relégué au fond de la classe des pays riches du G7.

Le Brexit a contribué à diminuer les perspectives d'activité pour 2017, 2018 et 2019, avec une inflation qui réduit le pouvoir d'achat des ménages et des entreprises peu enclines à investir tant que l'incertitude demeure sur l’avenir du pays hors de l'Union européenne. Mais au-delà, l'OBR n'a pas intégré l'impact d'une éventuelle absence d'accord entre Londres et Bruxelles, qui provoquerait un séisme commercial.

Productivité, le mal britannique ?

« Nous ne savons pas comment vont se terminer » les négociations, a justifié son président, Robert Chote, lors d'une conférence de presse prise d'assaut par les journalistes mercredi après-midi.

Les projections de l'OBR risquent de se traduire par « deux décennies perdues » sans hausse des revenus pour les ménages britanniques, s'est inquiété jeudi le centre de réflexion Institute for Fiscal Studies (IFS).

La principale cause de ces prévisions déprimantes réside en outre dans un autre mal, la productivité, c'est à dire la quantité de richesses produites en moyenne en une heure de travail. L'OBR constate que sa progression n'a jamais retrouvé son rythme d'avant la crise financière.

Les gains de productivité « reviennent à leur niveau d'avant la révolution industrielle », juge l'ex-gouverneur adjoint de la Banque d'Angleterre, Charles Bean, tandis que le think tank Resolution Foundation prévient que cette décennie sera la pire depuis le début du 19e siècle.

Le chancelier de l'Echiquier Philip Hammond a certes reçu quelques applaudissements pour l'habileté de son budget présenté mercredi : des tours de passe-passe permettent au déficit de ne pas augmenter malgré la croissance morose et quelques largesses et, surtout, les partisans les plus enthousiastes du Brexit ont salué la provision de 3 milliards de livres opérée pour se préparer à l'échec possible des négociations avec Bruxelles.

Mais il a aussi été assailli de questions virulentes jeudi matin dans les médias pour expliquer ce qui n'allait pas dans la productivité britannique, dans une situation de quasi plein emploi.

« Les entreprises britanniques investissent moins de capital par travailleur que nos concurrents étrangers, nos infrastructures publiques sont moins denses que dans les autres pays européens et notre niveau de formation est inférieur », a-t-il fini par reconnaître sur la BBC Radio 4.

Philip Hammond a prévenu qu'il faudrait « une génération » au Royaume-Uni pour redresser la barre en terme de formation, par exemple dans le domaine des mathématiques, le temps que les élèves instruits aujourd'hui arrivent sur le marché du travail.

Pour expliquer le problème, l'OBR a avancé de son côté le nombre élevé d'emplois peu qualifiés, de faibles investissements dans les machines depuis la crise financière et des conditions de crédit ultra favorables permettant à des entreprises peu compétitives de survivre en s'endettant.

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